Vernir est un projet de recherche et création qui découle d’une analyse autobiographique et d’une réflexion profonde basée sur l’importance de la beauté féminine dans nos sociétés actuelles, spécialement au Brésil, d’où je viens.
Deuxième consommateur de vernis à ongles au monde, ce pays accorde une extrême importance à l’apparence physique et à l’esthétique en général.
De ce fait, certains soins esthétiques se transforment en rituel, comme la manucure. C’est dans cette habitude que la magie se produit sous mes yeux. Dans une approche anthropologique, je décèle la nature artistique de cet acte.
Par le fait même que cet acte est très populaire et répandu sur toutes les strates sociales au Brésil, mon style s’inspire et puise dans une atmosphère très colorée, organique et pop.
Entre ces couleurs, je parle de la rencontre entre les femmes, du geste, de l’attention et des soins qui ponctuent une conversation intime, rehaussant et confortant l’estime de soi de l’une et de l’autre. C’est comme laisser une trace des récits. À travers mon interprétation subjective, j’espère soulever un questionnement sur les symbolismes et dangers de ce rituel de beauté.
Je suis allée à la rencontre de femmes à Montréal, majoritairement brésiliennes mais aussi d’autres origines afin de leur demander des vernis à recycler. Ces vernis appartenant à différentes femmes, gardent des secrets, des histoires, des sourires, de la force mais aussi des désespoirs, des formes de survie ainsi qu’une lutte de reconnaissance et une recherche d’apparences. Jusqu’à présent, plus de cinquante femmes ont contribué à ce processus.
“Chaque femme pourrait écrire l’histoire de son rapport à la beauté, analyser la place qu’a occupée dans sa vie son apparence physique….Entre la fin du XIX et le début XX siècle, deux événements ont infléchi la destinée des femmes en Occident de manière radicale et en sens contraire : l’invention de la photographie, et le féminisme…Aucune société humaine, sans doute, ne s’est trouvée empêtrée dans une contradiction aussi inextricable que la nôtre, qui nie tranquillement la différence des sexes tout en l’exacerbant follement à travers les industries de la beauté et de la pornographie.”
Reflets dans un oeil d’homme, Nancy Huston